A
u B o r d d u V i d e
À
l'origine, le film devait s'intituler « La Jeune Fille ou
La Mort », en lien avec le mystère qui en fait l'objet central
et en référence à cette thématique largement explorée dans le
différents domaines artistiques. La
collision
entre Éros et Thanatos fait
allusion à ce que Tiphaine enferme au plus profond d'elle-même.
Comment charger des images et des sons d'une force évocatrice toute
en tension? Comment pénétrer une intimité tout en restant à sa
lisière?
Le
terme de « disparition » évoque l'absence, celle,
subite, d'une chose ou d'un être. Ce
film, construit en creux, contourne l'indicible,pourtant contenu dans
chacune des séquences, mais de façon implicite. Quelque chose est
« dit » dans les silences de Tiphaine, dans les mises en
scène de ses photographies, dans l'expressivité de son visage, mais
ce quelque chose demeure insaisissable. Nous lui rendons son mystère
avec la pudeur et la charge suggestive qui hantent le film. La notion
de « nu », quant à elle, est choisie pour ce qu'elle
exprime de par sa charge à la fois érotique et mortuaire, créant
des jeux de dévoilement.
NU
DISPARITION
me permet d'explorer le lien que je perçois entre ce mystère et ce
que m'évoque le travail de Tiphaine. Pour dire ce qui relie l'image
fixe à l'image mouvement, le
temps à la lumière, le corps à l'espace, la mort à l'érotisme,
pour dire la vacuité, le film emprunte des chemins de traverses.
Les
photographies de Tiphaine associent la figure du corps humain à un
décor naturel, variable, parfois surchargé d'objets, parfois sobre.
Ces corps seuls ou en duo incarnent des figures isolées,
abandonnées, exprimant la solitude, la lassitude, l'ennui. Un
certain malaise émane de la mise en relation entre ces corps nus,
démunis, perdus et les décors. Lorsqu'elle fait poser, Tiphaine a
pour habitude de rester silencieuse, ne donnant aucune indication ou
très peu, livrant ses modèles à eux-mêmes, les laissant
instaurer, dans la durée, leur propre rapport à ces espaces soudain
dépourvus de repères. La séance s'opère dans une sorte
d'inconfort et de cette situation déstabilisante nait un sentiment
d'étrangeté.
Son travail
fait écho à ma démarche de vidéaste dans le sens où nous nous
attachons toutes deux à révéler, à travers des formes
dépouillées, les rapports que l'être entretient au monde, à
l'autre, à lui-même et de quelle manière il se révèle dans un
espace et un temps donnés.